Interview de Marie-Caroline BONNET-GALZY en 2015
30/01/2018
Entretien avec Marie-Caroline Bonnet-Galzy. Commissaire générale à l’égalité des territoires
Réalisé le 14 octobre 2015 par Catherine Duboscq – promotion Jean Zay - membre de la Commission Femmes
Comment avez-vous construit votre carrière ?
Je ne peux pas dire réellement que j’avais un plan de carrière au sens où je n’ai pas programmé les étapes suivantes, « le poste d’après ». Mais j’ai toujours su dans quels types de fonctions je voulais progresser.
L’essentiel à mes yeux repose sur deux principes. 1. Se connaître et connaître précisément ses appétences ; 2. Saisir les opportunités et être convaincue que lorsqu’une proposition vient, c’est que le responsable qui vous recrute vous fait confiance. Donc il faut y aller sans se poser de question quant à sa légitimité, question souvent très féminine.
Précisément, comment identifier qu’une proposition est une réelle opportunité ?
D’une part, c’est trouver un poste en accord avec ses aspirations. Ma formation HEC et Ena puis mon premier poste à l’IGAS nourrissaient mon ambition de travailler dans le secteur hospitalier. L’hôpital représente pour moi une fonction éminente de service public qui se conjugue avec une dimension entrepreneuriale, au sens où l’hôpital est souvent le premier employeur local en même temps qu’un pôle de haute technicité, au service des patients.
D’autre part, une opportunité est une rencontre. Des personnalités m’ont invitée à échanger puis m’ont fait confiance, enfin m’ont inspirée. Ma rencontre avec François Strasse, alors Directeur général de l’AP-HP fut déterminante par exemple. Je crois à la fonction de mentorat. Elle peut aider à identifier qu’une proposition, qui apparaît en première analyse décalée par rapport à l’idée générale que l’on a de son parcours ou de ses compétences, est en réalité l’opportunité à saisir, celle qui ne se refuse pas.
Et quelles sont les caractéristiques principales de votre carrière ?
Au-delà de mon objectif premier de travailler dans les hôpitaux, j’ai découvert que j’avais une vraie appétence pour le management. Je me définis d’ailleurs souvent comme un ensemblier. Ce travail d’ensemblier nourrit une stratégie et le sens donné à une politique publique.
J’ai compris très tôt que j’aimais conduire le changement. Mon engagement dans le secteur hospitalier a débuté dans une période de bouleversements profonds : le développement de l’ordinateur, les nouveaux défis de santé publique, en particulier le SIDA, un corps social complexe, le déploiement d’un modèle de déconcentration avec les ARH qui ont préfiguré les ARS… Tout cela supposait d’accompagner le changement, de mettre ensemble les acteurs.
Par ailleurs et dans un autre registre, en devenant chef de l’Inspection générale des affaires sociales en 2000, (première femme à accéder à ce poste), s’est posé pour moi le mode de management d’un corps d’inspection subtil, très affectif, caractérisé par des rapports intergénérationnels parfois compliqués mais très fructueux.
J’ai conçu cette mission comme un travail d’équipe. J’ai contribué à créer les comités des pairs et j’ai toujours recherché les regards croisés, particulièrement ceux de tiers.
C’est cette dimension managériale qui vous conduit à Lille comme directrice générale des services de la communauté urbaine présidée par Martine Aubry en 2009 ?
Avec le recul, oui sans doute, car cette expérience passionnante est une forme d’aboutissement sur le plan managérial.
Cependant, lorsque cette proposition s’est présentée, je ne l’ai pas identifiée comme une opportunité ! Car a priori, trop éloignée de mes bases professionnelles et familiales. Mon choix de saisir cette proposition est le fruit d’une réflexion dans laquelle mon mari était moteur. Il a su, mieux que moi sur le moment, comprendre que c‘était une opportunité à saisir absolument et que cela était parfaitement soutenable pour notre vie familiale.
Finalement, ces cinq années constituent une expérience extraordinaire ! Cette fonction supposait bien évidemment une relation étroite avec Martine Aubry que j’avais connue au ministère du travail en 1998. Je savais donc que j’allais travailler pour une personnalité forte dont les méthodes de travail me convenaient parfaitement. D’une part, le temps est extrêmement dense et utile, d’autre part, la décision est claire et sans ambiguïté.
Vous évoquez le rôle de votre mari dans ce choix, comment articuler vie professionnelle et vie personnelle ?
Dire d’abord qu’il ne faut pas avoir des enfants trop tard ! Il faut en effet une bonne santé physique et beaucoup d’énergie quand ils sont petits, de la disponibilité mentale quand ils sont plus grands, alors que la progression dans la carrière demande de plus en plus d’engagements.
Puis être attentif à la qualité du temps passé en couple ou en famille, en week-end ou en vacances !
Enfin, une carrière s’inscrit dans un projet de vie. Un projet partagé est un projet dont les étapes de l’un ou de l’autre se succèdent et se complètent. Et, quand on regarde dans le rétroviseur, tout cela forme au final, un ensemble plutôt cohérent.
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